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Centieme Anniversaire de Loti la Turquie n'oublie pas

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Tam metin

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FEVRIER 1950

-T T -â ê

-V W I

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Centième Anniversaire de Lioti

Lia Turquie n’oublie pas

Q ue cet a n n ive rsaire ait fourni l'occasio n o ffi­ cielle de ra p p e le r quel ami de la Turquie fut Pierre Loti, v o ilà la preuve que la g ratitu de d ’un peuple n ’est pas seulement inscrite sur la plaque d'une m ai­ son d 'Istan b u l. La tradition de Loti est présente, iden­ tifiée p ar bien des aspects à l ’am itié tu rco -fran çaise. Comme e lle , à moitié affe ctiv e , à moitié litté ra ire , elle se d égage d'une faço n de penser et de sentir.

Au contact de chaque p ays nouveau, la sym p a­ thie qui s’é v e illa it en Loti, l'e n tra în a it dans cette poursuite qui fut son aventu re: la recherche de l’id e n ­ tité entre les hommes, et de son identité avec les hommes. M ais nulle part ailleu rs qu'en Turquie il n'a été si près de son achèvem ent, nulle part il ne s'est a v an cé si loin sur le chemin de la rencontre. Dès sa description de la M osquée V erte, Loti montre q u ’il a compris la Turquie. Lorsqu'il s’ h ab ille à la faço n du p a y s, il donne une form e im agée à son intuition pro ­ fonde de la vie turque.

A l ’inverse de l'ad u la tio n entourant l ’écrivain v ivan t, certains n’ont plus voulu vo ir, lui disparu , que le p aysag iste des choses du passé. Pour d ’autres pays sans doute Loti fut un peintre inactuel. Robert de T ra z dit que «Loti s'en v a m ais n ’arrive nulle p a rt» . Il n ’est pas si fa c ile d'enferm er le rom ancier dans une fo r­ m ule: Son exotism e est à face ttes. La turque, la plus b rillan te révè le , à côté des descriptions qui firen t sa g lo ire , l'o b servateu r du milieu social et le p artisan . Parfois des remous en traîn és par la vag u e Kém aliste ont voulu attein dre le prestige d ’ Istanbul à travers ce qu’on po urrait ap p e le r « l’ aspect osm anli du Lo- tism e». M ais au jo u rd ’ hui le courant révolutionnaire a ré a lisé ses a sp iratio n s. Les e au x sont ap aisées et l’ hom m age unanim e peut monter vers l ’écrivain dis­ paru.

Loti attend au jou rd’ hui dans ce purgatoire des écrivains morts, que les vivan ts choisissent pour lui entre le panthéon et l'o u b li. L'oeuvre reste cepen ­ d ant étonnam m ent active p ar le nombre des v o c a ­ tions d ’o rientalistes et de m arins q u 'elle a provoquées. Et la Turquie g a rd e le souvenir de la vision lucide du rom ancier, comme de la fid é lité de l ’am i. E lle n ’oublie p as qu’a u x heures d'épreuve Loti fut à ses côtes, pour com battre des erreurs qui alors triom phaient. Les é vé ­

nements ont prouvé qu'il ind iq u ait la voie de la justice, avec ce lle de la sérénité.

Loti ne d é fe n d a it p as, comme on l’a dit p a r­ fo is, la Turquie de sa jeunesse, mais la Turquie tout court, la Turquie de toujours. Nous ne voulons pas ab o rd er ici l'oeuvre trop connue de l ’é crivain . M ais on peut souligner combien la perception de la ré a lité turque fut subtile chez Loti, et se laisser e n g ag e r à ce propos, dans la fam euse querelle des «D é sen ­ c h a n tée s» . Des témoins o culaires ont confirm é que Loti a v a it vu la femme turque, de l'in térieu r même du harem . T an t de détails essentiels à l'in trig u e , qui ne peuvent pas être issus d'une supercherie! Ils n'ont pas d ’autre source que le milieu lui-même et l ’on im a­ gine mal une p arisien ne poussant à ce degré la per­ fection de l ’im posture. Loti a touché du doigt le mur qui se dressait d evant la femme de la société sfam- b o ulio te; il en fournit la description authentique, et p ar là , e xp liq u e l'in flu e n ce de la femme turque dans l ’évolution des années qui suivirent. Doit-il à son respect des conventions .du style de l ’époque, cette réputation imméritée de m éconnaître la vérité p sy­ cho lo gique? Le doit-il plutôt à la g râce d'une écriture curieusement fém inine mais sans rien d'am b ig u ? Il semble que les femmes aien t été les m eilleurs juges. Elles ont le mieux pénétré sous les longs ad jectifs, « la part immense de vérité d ’un style qui sem ble mur­ murer, rêver, suggérer, plus q u ’il ne s ’attach e à fo r­ muler nettem ent», comme l’écrit A n n a de N o a ille s.

Loti g a rd a it, au milieu d'un salo n , une gran de réserve. Il n ’était naturel qu’avec ses intimes et p a rti­ culièrem ent avec des gens sim ples. « A v e c les petits p aysan s des m ontagnes ou les petits pêcheurs de l'île » , écrit Loti dans des Souvenirs de Jeunesse iné­ dits pu’il co nfiait au supplém ent du «Stam boul» pour N oël 1 9 0 4 , «je n’a v a is jam ais été fie r ... tandis que j ’étais fie r avec ces enfants du co llèg e qui eux, me trouvaient b izarre et poseur. Il m'a fa llu bien des années pour corriger cet o rg ueil, pour red evenir simplem ent quelqu'un comme tout le m onde; surtout pour com prendre qu'on n ’est pas au dessus de ses sem blables, parce que — pour son propre m alheur — on est prince et m agicien dans le dom aine du rê v e ...» .

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TOURING ET AUTOMOBILE CLUB DE TURQUIE

Aziyadé dessinée par la plume de son amant

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Pierre Loti iki çarşaflı hanımla P i e r r e L o ti e n tr e d e u x d a m e s tu r q u e s p o r t a n t le

tc h a r c h a f

J 'a i devant moi un livre. L’auteur en est C lau d e Fa rrère . Il contient 100 dessins. Ces dessins sont fin s, ag ré a b le s, au trait p ré cis... Des croquis, des p a y s a ­ ges. De fo rt jo lies choses, mais leur auteur n'est pas un peintre connu. Et je suis même sûr que si je vous dis son nom, celui de ses parents, celui qui figure sur ses pièces d 'identité, il vous sera totalem ent in ­ connu: Ju lien V ia u d . Ce nom ne sig n ifie rien pour vous, n ’est-ce p as? Vous av e z raiso n , car le monde entier co nn aît l'o ffic ie r de m arine fra n ç a is Julien V iaud sous le nom de Pierre Loti.

C lau d e Farrère, ce fid è le ami de Loti, a réuni cent dessins tracés p ar son m aître et il vient de les publier en même temps que ses souvenirs sur Loti. Nous apprenons ainsi que Loti fa is a it du dessin, à ses moments perdus. Et du dessin e xce lle n t. Parmi ses oeuvres, il y en a qui nous intéressent de très près. Voici S alo niqu e au crépuscule, des volo ntaires turcs p artan t pour la g u e rre ... La Sublim e P o rte ... Le sélam- lik du Sultan Abdülham id II à la mosquée de Dolma- b a h tc h é ... Une vue d 'E y ü b ... L'éclipse de lune du 27 fé vrier 18 77 sur Ista n b u l... Et enfin deux portraits d'une jeune fem me, l’un de p ro fil, l'au tre de fa c e . Des yeu x attira n ts, les sourcils un peu fo urnis, mais des traits d ’une finesse extrêm e, des lèvres régulières, ses cheveux qui retombent en tresse des deux côtés de la tête, c'est une gracieuse beau té turque. C'est

H atid jé . M ais le monde entier la co nn aît sous le nom d ’A z y a d é .

Dans cet o uvrag e, intitulé "C e n t dessins de Pierre Loti” , C lau d e Farrère nous fa it le récit d'am ours m agnifiques et très tristes. Une histoire qui laisse bien en arrière la tra g é d ie de M eyerlin g , dont tous les dessous nous sont révélés au jou rd 'hu i, et répand la lum ière sur un événem ent d'histo ire litté ra ire .

Nous sommes au mois de mai 1 8 7 6 ... A S a lo ­ n iq u e ... Il est près de 4 heures de l ’après-m idi. Dans le q u artier tran q u ille et haut perché q u 'hab iten t les M usulm ans, un o fficie r fra n ç a is , court de ta ille , aux épaisses m oustaches, fin et é lé g a n t, se promène au h asard . Dans le port des navires de guerre a n g la is, alle m a n d s, autrichiens, italie n s, russes et fra n ç a is sont an crés. Le nom du croiseur fran çais (o n disait encore, à l'épo que, une fré g a te ) est la " C o u ro n n e ". Un é vé ­ nement g rave a eu lieu en v ille . Les consuls de France et d 'A lle m a g n e ont été assassinés l’un après l'au tre . Q ue voulez-vous, c'est ici l'Em pire O tto m an, I’ “ hom­ me m a la d e ” de l ’Europe. Les “ puissances” ont forcé sa porte, e lles dem andent "ju s tic e ” . Et ce même 18 m ai, 6 bo urreaux pendirent à 6 potences 6 condam ­ nés qu'on adm ettait être les coupables du double a s ­ sassin at. M ais les navires de guerre étrangers sont toujours dans le port.

Le marin qui se prom ène en touriste dans le qu artier musulman est précisém ent un o fficie r de la "C o u ro n n e ” . Il s'a p p e lle Ju lien V ia u d . Il est anim é de d ép lo rab les "id é e s fix e s ” à l'é g a rd des Turcs. Elles sont le fruit des “ connaissances historiques” et de l'éducatio n qui lui ont été inculquées à l'éco le et qu'il a puisées dans le milieu où son éducation s’est fa ite . Toutefois, depuis quelques jours qu'il vit parm i les Turcs, il a été obligé de m odifier beaucoup de ces idées. Il a constaté que ce sont des hommes comme les "E u ro p é e n s” , qu'ils sont même supérieurs sur cer­ tains points a u x “ Européens” . M ais, quoi qu’il en soit, l'im pression laissée p ar les années n'est pas entière­ ment e ffa c é e . Il suffira d'une paire d 'ye u x verts pour la b a la y e r com plètem ent. Et Ju lien V ia u d , sous le nom de Pierre Loti, deviendra le plus fort défenseur des Turcs en Europe.

Cette p aire d 'ye u x verts, ce sont ceux qu'il a aperçus derrière une épaisse g rille de fe r, tout près d'une mosquée. Pierre Loti n'en détache plus son propre reg ard . La jeune femme a des sourcils lég ère­ ment froncés, épais et rapprochés jusqu'à se joindre. L'expression de ce visag e de femme est fa ite à la

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1877 de Dolmabahçede Selâmlık resmi

S e la m lık à D o lm a b a h tc h é en 1877 (d e s s in de P i e r r e L o ti)

fois d 'énergie et de n aïve té . “ On eut dit un regard d 'e n fa n t, tant il a v a it de fraîch e u r et de jeu n e sse ".

Et la femme a u x grands ye u x, dont l’iris était vraim ent “ de cette teinte vert de mer d ’autrefois, chantée par les poètes de l'O rie n t" , dès qu’elle se vit reg ard ée et reg ardée p ar un de ces étrangers qui étaient venus m enacer son p ays, fit très naturellem ent ce qu'en l'occurrence font toutes les femmes qui se savent jolies et élégantes et sont sûres d ’elles-m êm es; elle se le v a . E lle a v a it sur la tête un “ fé ra d jé " de soie verte, brodée d 'arg e n t, assorti à ses yeu x et, suivant la mode d 'a lo rs, un “ ya ch m a k ” qui laissait à nu les ye u x, le front et la bouche.

Cette même fem me, huit jours plus ta rd , le 27 juillet 1 8 7 6 , devait rencontrer Julien V iaud dans un

calq u e , du larg e de Salo niq u e. A vouez que l ’o fficie r de m arine est très h a b ile . Et H atid jé est très a u d a ci­ euse. Comment se sont-ils entendus, qu'ont-ils dit? La femme ne sait pas un traître mot de fra n ç a is ; l ’homme est in ca p a b le d'exprim er en turc les choses les plus sim ples. M ais il y a l'am our, en l ’occurrence. Et il y a la langue de l ’am our.

Julien V iaud trouve un b atelie r ju if. Son nom est D aniel (Il deviendra cé lè b re, lui aussi, dans " A z y a - d é " sous le nom de S a m u e l). Il s’assure ses services en qualité d 'interprête. Et il a enfin la po ssibilité, p ar son truchement, de s’entretenir avec la p rop riétaire de ces b eau x ye u x. Q u an t à H atid jé , e lle a v a it su­ borné sa négresse et son cavas a lb a n a is ; ils lui prêtent leur assistan ce. Et une nuit, a u x heures où les femmes

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ne circulent guère dans les rues, accom pagnée de ses deux serviteurs, e lle se rend avec une g ran d e au d ace au bord de la mer, prend p lace dans un beau et fin ca ïq u e ; e lle s'élo igne de la côte. Peu après Pierre lo ti a p p a ra ît dans la barque de D a n ie l. L'om bre des navires de guerre s'étend sur la mer. Les deux em­ barcatio n s se rap p ro ch ent. Le marin saute dans le caïqu e de H atid jé a u x coussins de duvet, recouvert de tapis et de so ieries; la négresse et le C a v a s a lb a ­ nais passent dans l'em barcatio n de D a n ie l. Pierre Loti prend les avirons et dirige l'em barcatio n vers le la rg e ...

L'excursion dura exactem ent trois heures. Les étoiles s'éteig n aie n t lentem ent au c ie l. Les am oureux reviennent. Désorm ais Pierre Loti p a rle ra de H atidjé en disant " m a petite am ie turque” et il ne l’oubliera plus, plus jam ais, jusqu'à la fin de sa vie . Cette nuit in co m p arab le , au larg e de Salo n iq u e , dem eurera le plus vivan t de ses souvenirs, après qu'il au ra connu la g lo ire .

M ais l'heure de la séparatio n vie n d ra très vite. Le lendem ain même de cette nuit passée à la lueur des éto iles, Pierre Loti était tran sfé ré à bord d ’ un n avire de guerre fra n ç a is se trouvant à Istan bul. C ’était un de ces “ sta tio n n a ire s” qui, en vertu des C ap itu latio n s, statio n naien t en perm anence à Istanbul.

Si H atid jé a v a it été une m aîtresse quelconque, Loti au ra it pu quitter Salo n iq u e , sans même l ’avertir. M ais la jeune fem me n 'était pas pour l'o ffic ie r de m a­ rine fra n ç a is , une de ces “ am oureuses dans chaque po rt” . Loti a v a it donné son coeur à H atidjé.

Q ui est H atid jé ? C ’est la quatrièm e fem me, la plus jeune des qu atre, d ’Emin e fen d i, un homme riche. E lle é tait, de ce fa it, la fa v o rite du fo y e r, la prunelle des yeu x de son é p o u x. Emin efendi p assait l'autom ne à Istanbul et l’ hiver à Salo n iq u e . Cet Emin efendi de­ vien t Abeddin efen d i, dans A z y a d é .

En ap p re n a n t que Loti ira à Istanbul et qu'il s'y é ta b lira , H atid jé ne se désespère p as; au co ntraire, e lle s'en réjouit. Elle p assera ainsi tout l ’ hiver avec l ’o fficie r court de ta ille , aux épaisses moustaches qu’­ elle aim e. Elle fa it donc dire à Loti, p ar l’entrem ise de D a n ie l: “ En autom ne nous irons sûrement tous à Istan bul. C ar même si mon mari n 'y v en ait pas, j'ira i moi seule, pour Lo ti".

Et de fa it, e lle vient.

Pierre Loti loue d ’abord une maison à H askeuy, puis à Eyüb. H askeuy est trop bruyant pour les am ou­ reux qui cherchent un ab ri sile n cie u x; les Ju ifs qui y h abitent sont trop curieux. Eyüb convient mieux à ceux qui veulent vivre retirés. C 'est là qu’H atidjé et son ami ont vécu leurs plus belles heures. La jeune

femme a recours à m ille et une intrigues; e lle s’a s ­ sure m ille et un concours. Et à chaque o ccasion, elle court à Eyüb, se jeter dans les bras de son am ant.

M ais le temps passe rapidem ent. Le 17 mars 1 8 7 7 , le " G la d ia t e u r " , le n avire de Loti, reçoit l'ordre du retour en Fran ce. Loti promet à H atidjé de revenir. Et il quitte Istanbul dans la douleur.

Tout d ’abord d ’ardentes lettres d'am our sont échangées. H atidjé ne sait pas lire et écrire; elle sort donc de chez e lle a recours à un écrivain public, puis e lle co nfie sa lettre à sa négresse pour a lle r la dé­ poser à la poste fra n ç a is e . Les lettres de l'o ffic ie r de m arine sont dirigées vers cette même poste et la négresse va les chercher. M ais, tout ce la est si loin d'éteindre la flam m e qui dévore les coeurs des deux am o u re u x...

Loti é ch a fau d e des plans pour fa ire évad er H a ­ tidjé d 'Ista n b u l; il trouve même l'homme qu'il fau t pour c e la . M alch a n ce , cet homme, un Hongrois du nom de P o g arritz, meurt. Et nos am oureux ne peu­ vent fa ire plus q u 'éch an g er des lettres enflam m ées.

C 'est sur ces e ntrefaites que Loti publie " A z y a ­ d é ” , C 'est l'histo ire, peut-être trop fid è le , de son aventure ave c H atid jé. Evidem m ent, les noms avaie n t été m odifiés. M ais les faits sont les mêmes. Un riche harem de quatre épouses se transporte en décembre 1876 de Salo niq u e à Ista n b u l... Cette seule précision suffit à id e n tifie r les personnages. Et c'est le grand scan d ale qui é cla te . La censure interdit le rom an. M ais il circule sous le m anteau. D ’autant plus que le séjour de Loti à Eyüb a v a it attiré bien plus de curio ­ sité qu'il ne se l’im ag in ait. H atidjé elle-m êm e fit quelques im prudences. Emin efen d i, qui s’est reconnu dans “ A z y a d e ” , mais qui n'en souffle pas mot, ne tard e pas à prendre ses mesures.

Les lettres de H atidjé cessent.

A n k a r a O p e ra s ı m e th e li E n tr é e de l’O p é ra d ’A n k a r a

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E y u p te b i r k a b i r C im e tiè re à E y o u b

L’an n ée 1 8 8 7 ... Nous sommes dans le cim etière des environs de T o p ka p i. Un o fficier de m arine pleure. La pierre tom bale qui se dresse devant lui est celle de H atid jé . Depuis sept ans, la “ petite am ie tu rq ue" est sous la terre. A près que son mari eut compris sa tra- hision, il l’a enferm ée dans une cham bre, et n 'a p er­ mis à personne de s’entretenir avec e lle . L’iris de ses ye u x, “ de cette teinte vert de mer d 'au trefo is, chantée p ar les poètes de l ’O rie n t" a perdu peu à peu sa v iv a cité . La be lle fleu r de S alo niqu e s'est f a ­ née privée de so leil.

Pierre Loti revient plus tard à Istanbul et il fait reproduire une stèle exactem ent sem blable à celle de H atidjé. Ju sq u 'à sa retraite, il la conservera dans la cabine de son n a v ire ; après sa re tra ite , chez lui, dans sa maison de Rochefort. Il y a aussi une mosquée dans cette maison de Rochefort. Et la stèle est dans cette mosquée.

Ju sq u ’à sa mort, Loti sera le défenseur le plus ardent des Turcs en Europe. Il p aye sa dette envers H atid jé . Et Farrère de conclure:

“ C e lle qui dort sous la petite tombe de To p ­ k ap i, fut pour sa patrie et pour tout l'Islam une fée b ie n fa isa n te . M ais pour l’ hum anité, e lle fut bien d a v a n ta g e ."

Elle a donné à la France un grand é crivain , car sans e lle Loti au rait-il écrit non pas seulement “ Az- y a d é ” , mais aussi “ Fantôm e d ’O rie n t” . Et à la Tur­ quie, elle a donné un précieux défenseur.

Voici l'aven tu re d'am our de cette jo lie fille aux yeux verts, sa m agnifique et trag iq u e aventure d ’am our.

METİN TOKER.

Le Secret de Loti

La Conférence du Professeur Guy Michaud

à la Faculté des Lettres d'Istanbul.

Après l'hom m age d'ad m iratio n rendu à Pierre Loti Ip jour même du centièm e a n n ive rsaire de sa naissance soit à l ’ Union Fran çaise, sous le p atro n ag e de l’A ssociation C u ltu relle T urco -Française, soit dans la presse, l ’U niversité de notre v ille a pris à coeur de justifier cette ad m iratio n, en d ég a g ea n t la s ig n ific a ­ tion profonde de l’oeuvre de l'o fficie r-p o è te fra n ç a is . A près l'allo cu tio n brève, mais combien sentie du Professeur Ahm et Ham di T a n p in a r, heureux et fie r de compter parm i les Am is des Turcs un homme de la valeu r de l'auteur d '« A z iy a d é » , et la causerie pleine de ch aleu r et de v iv a c ité de M. Djevdet Perin sur «Loti et la Turqu ie», M. G u y M ichaud nous entretint, à son four, du «Roi de l'exo tism e».

D evant un auditoire nom breux et choisi, p ré­ sidé p ar M. D jé la l Sartch , recteur de l'U n iversité et composé de professeurs, d'intellectuels et d'étud iants, le conférencier exp o sa son sujet avec la précision, la netteté coutumières de son style si personnel et avec sa sim plicité éloquente parce que sincère et n a ­ tu re lle. «Le secret de Loti», il nous le liv ra , non pas à la m anière de tel m age, solennel et m aniéré du Sym bolism e — son dom aine litté ra ire pourtant — en termes em phatiques et boursouflés, m ais fra n c h e ­ ment, sans cérém onie aucune, avec la can deur pour­ rait-on dire, du fin lettré et les expressions é vo catri­ ces, les périodes rapides et légères au x im ages g ra ­ cieuses et au rythme harm onieux, du v ra i poète.

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Dès le début, M. M ichaud nous é c la ire sur le c a ­ ractère de sa co nféren ce: celle-ci sera plutôt objective que subjective.

«Loti a su tout vo ir et tout e xp rim e r» , déclare entre au tres, A rm and Praviel qui, loin de justifier son assertio n , ajo u te: «M ais c e la , je n ’a u rai pas le p é d a n ­ tisme d 'e xp liq u e r comment. C 'est ici le Secret de Loti». Et d 'a b o rd , comment tra v a ille l ’auteur de «Ra- m untcho»? Au jour le jour et au gré de son humeur, il prend des notes, a u xq u e lle s il n ’ap p o rte que de r a ­ res retouches. D’où le m anque d ’abo rd de « ré sista n ­ ce» de sa phrase et de sa pensée et ensuite de « co n ­ sistan ce» de ses perso n nages. Loti n 'a pas le tem pé­ ram ent d ’ un rom ancier. Aussi ses héros n ’ont guère, sau f de rares exception s, de re lie f. Ou bien ce sont des p an tin s, mûs au gré du cap rice de l'au teu r, ou bien des co pies, des exem p laires tirés de l'o rig in a l et qui traîn e n t des île s de la Polynésie à M a d a g a sc a r, les tourments et les angoisses mêmes de Ju lie n V ia u d .

Et pourtant, m algré l’in é g a lité de son style , fo r­ mé à l'éco le ré a liste , et l ’absence chez lui de toute préoccupation psychologique, Loti continue à séduire ses lecteurs. A quoi attribuer ce charm e qui n 'a pas cessé d 'o p érer sur une génération pourtant e xig e a n te , p arce q u 'é cla iré e , quant à l'a rt du rom an, p ar des m aîtres tels que François M au riac, Roger M artin du G a rd , Jacq ues de Lacre te lle , Romain R o lla n d ... Cet a ttra it, cet enchantem ent est dû au fa it que son oeuvre est purement et sim plem ent l’ histoire de son âm e à la fois org ueilleuse et tim ide, avid e de te n ­ dresse et d é fian te de l’am our, le journal de sa vie

douloureuse écrite au jour le jour et jusqu'à peu a van t sa mort. Il commence la rédaction de ses rom ans-con­ fidences bien a v a n t la publication de son prem ier livre « A z iy a d é » en 1 8 7 9 , bien a v a n t de promener son «rom antism e dernier m odèle» et «son mal de fin de siècle, cette dernière form e du mal du siècle» sur les océans et sur les continents. Depuis l'â g e de douze ans d é jà , Loti sent le besoin de se raco nter, puisque tous les soirs, à peine de retour de l ’éco le , il s ’e n ­ ferm e dans sa cham bre et confie ses sentiments et ses pensées à une interm inable ban d e de p a p ie r, por­ tant à sa tête, dessinés à l'en cre rouge, deux sphinx d ’Egypte et une étoile cab a listiq u e , au xq uels l ’en fa n t, prém aturém ent superstitieux, attribue le don d ’e x o r­ cisme. C e n a ïf jo u rn a l, a u x caractères inin tellig ib les et m ystérieux, contient déjà le secret, l'ém ouvant secret de Loti révélé plus ta rd , tout le long de ses rom ans et deviné à dem i, dans le reg ard de ses yeu x de « c h a t, dont la fix ité m étallique et la profondeur inq uiétante de la pensée a u x aguets» a v a ie n t tant fra p p é C lau d e Farrère.

Les ye u x des chats, l'écriva in les aim e d 'ailleu rs au tant que ceux des chiens, des singes et des autres an im au x. Il lui sem ble entrevoir dans leu r reg ard sup­ p lia n t ou te rrifié , leur âm e p ito ya b le , plus p ito yab le même que celle des hommes, p arce que plongée dans les ténèbres de la dem i-conscience. O u i, toute sa vie, il au ra pitié non seulem ent de lui-m ême, de sa propre destinée, mais aussi, et peut-être autant de ses frères, les hommes, que des pauvres bêtes, qui se débattent dans un éternel clair-o bscur.

Eyüp camii M o sq u ée d ’E y o u b

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A sa com m isération pour la créature, pour toute créature, victim e de la douleur, de l'in justice, de l'in ­ com m ensurable b a rb a rie de la C réa tio n , à sa «pitié suprêm e» pour les désespérés, pour les m alheureux, s'ajo ute un autre thèm e, égalem ent dom inant de son o euvre: la nature qui attire irrésistiblem ent le m arin, avid e de cieux et de visages n o u veaux. A vra i dire, ses rom ans-aveux « re la te n t, comme le rem arque ju­ dicieusem ent le co nféren cier, les phases successives d'un dram e à deux perso nnages: Loti et la nature qui entretiennent l'un avec l'au tre un d ialo gu e in ­ cessant. Et d 'au ta n t plus pressant, d ’au tant plus d ra ­ matique que, plus encore que les chats ou les hommes, a u x ye u x de Loti cette nature a son secret, un secret qu'il s’ag it de découvrir».

En e ffe t, si le poète rêve de plages de sa b le , de soleils é cla tan ts, de forêts tro picales et de bois so li­ ta ire s, c ’est sans doute, pour chercher l'o u b li « a il­ leu rs», pour sortir de l ’an go isse, des tourments hu­ mains toujours les mêmes, chez les sauvages à l'in ­ telligen ce prim itive, comme chez les civilisés à l'âm e com pliquée; mais c'est aussi pour com prendre la n a ­ ture dont il veut dém êler et puis interpréter, la trou­ b lan te énigm e.

Le précieux «Sézam e ouvre-toi» donnant accès au monde e xtérieu r, m agique et fa sc in a n t, le jeune o fficie r de m arine le doit à la mer. D 'abo rd elle l'e ffra y e , e lle l’épouvante même et puis, le premier moment de stupeur passé e lle le fa scin e comme l ’en­ chantero nt, l'én ivrero nt, à leur tour, les landes b re­ tonnes, les déserts afric a in s incendiés d ’ un soleil im ­

p la c a b le , la lu xu rian te vég étatio n du Ja p o n . L’auteur s’ide n tifie à n ’en pas douter ave c Je a n P e y ra l, ce jeune garçon qui, envoyé en A friq ue dans les spah is, aim e tant son S énég al et sa petite négresse perverse et m échante qu’il voit pour le coup «n o ir» et que «les idées s’em brouillent dans sa tête tro ublée» le jour o ù « la d é liv ran ce inattend ue» lui permet de rentrer en France.

Bien qu 'in crédu le, Pierre Loti croit au x puissances occultes du «somm eil et de la mort» qui s'ab a tte n t sur son héros, à « la vie m ystérieuse et en quelque sorte sup rano rm ale où b aig n e , — dit M. M ichaud, — à notre insu, notre existence coutum ière».

N 'a ffirm e -t-il pas a vo ir vu une fo is, dans la sa lle à m at.ger du château de S in a ïa , en présence de ses hôtes, le roi et la reine Elisabeth de Roum anie, p a s ­ ser «entre la c a ille et la s a la d e » , un fan tô m e, une form e toute b lan ch e qui, tous les soirs, entre chien et loup, a v a it pris l'h ab itu d e de se «prom ener supra- royalem en t» et n arg uant factio n n a ire s et h a lle b a r- diers « d ’une extrém ité du konak à l'a u tre » ?

Au contact sans doute des nègres ses tahitiennes et des mousmés jap o n a ise s, sous l ’effet des effluves s’e x h a la n t des p aysag e s exo tiqu es, Loti se laisse a lle r à la superstition. A in si à l’encontre des chats blancs qu'il « a d o re » , les noirs lui font peur et les blancs noirs au ssi, les chiens «crochus» surtout qui, au cours d'un rêve q u ’il fit une nuit sous sa. tente au M aroc, l'a v a ie n t « g riffé d'un coup de patte ra p id e » .

C ep en d an t, il est un p ays et dans ce p a y s, une v ille qui le cap tive n t, bien autrem ent que toutes les

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TOURING ET AUTOMOBILE CLUB DE TURQUIE

contrées étrang es parcourues jusqu’ ici. C 'est la T u r­ quie, c’ est Stam boul, la fée b ie n fa isa n te , la reine du charm e. Toute sa vie , Loti aim era les rives du Bospho­ re, la C orne d ’O r. Ja m a is ne cessera l’enchantem ent q u ’il s ’est, comme il l'écrit, «inutilem ent épuisé à com prendre, à fix e r et à traduire p ar des mots hu­ m ains» et ce la p arce que c ’est en Turquie qu'il a con­ nu la g ran d e , la v é ritab le passion. M ais si A z iy a d é a tout tran sfiguré de sa présence, ce profond amour lui a , en retour « à lui Loti, perm is, à travers et au- delà du p a y sa g e qui en constituait le cad re , de d é ­ couvrir l'âm e secrète de Stam boul et, par un retour des choses q u asi-m iracu leu x, Stam boul lui a permis de découvrir son âm e» qu'il met à nu dans son chef- d'o euvre «Fantôm es d ’O rie n t» . Comme l'au teu r de «Du côté de chez S w an n » il y part à « la recherche du temps perd u», à la reconstitution du roman de sa v ie .

Encore sur le bateau qui le ram ène à Stamboul en septembre 18 87, à la vue de la terre turque dont il perçoit à nouveau la senteur pénétrante depuis si longtem ps o ubliée, «brusquem ent tout un monde d'im pressions lui revient; une coupure, un d édo uble­ ment se fa it dans sa p erso n nalité, comme p ar m iracle; il redevient l ’au tre, celui q u ’il é tait, il y a d ix a n s» .

A peine déb arq u é, il asp ire de tout son être à revivre les anciens jours. Les am ulettes ténébreuses, les influences occultes qui l'a v a ie n t jusqu’ici, empêché de revenir, comme il l'a v a it prom is, le traquent m ain­ te n an t, le poussent à a lle r, h ale tan t, oppressé, à travers la v ille , à la quête des traces disparues de­ puis longtemps h élas, de la femme bien-aim ée. Et le professeur M ichaud de nous fa ire , le récit pittoresque et aussi savoureux q u ’ém ouvant de la course fo lle du poète, tout le long de la Corne d 'O r, jusqu’au cim e­ tière, jusqu'à la tombe qu’il finit p ar découvrir à l’ombre d ’un cyprès. M ais il retrouve aussi avec e lle , ô m iracle! son passé, tout son passé qui, lentem ent entre, comme un b ien fa isa n t rayo n de so le il, dans son coeur. Au moment o ù il désespérait le plus, il éprouve ce qu'il nomme les «é tran g es chocs de rap p e l» bien connus de Proust et qui, chez Loti, sont d ’autant plus forts que c'est l ’am our, cette délicieuse et m ortelle m agicienne qui les provoque.

Ainsi donc, alo rs q u ’il se recueille sur l'hum ble pierre d ’A z iy a d é et évoque le souvenir de l ’am ie dis­ p aru e, en dedans de lui-même, dans le tréfond de la pensée, des puissances secrètes, porteurs de sortilèges bénéfiques mènent, lui sem ble-t-il, d ’abord grand bruit, puis se taisent, après avo ir «illum iné» en q u el­ que sorte les replis de son âm e. Tout à l ’ heure encore,

en proie à la so uffran ce la plus aig u ë , à l'a b a tte ­ ment le plus profon d, d evant la fuite du tem ps, d e ­ v an t la van ité des choses et des sentim ents dont il ne reste même pas le souvenir, il voit soudain se lever, d evant lui, le fantôm e de la tendre et douloureuse C ircassie n n e , ram ené sans doute p a r les mystérieuses ém anations ja illie s des pierres, de la terre, toujours la même, dont ils a v a ie n t, tous les deux vu, recouv­ rir un jour, le corps d'une jo lie petite fille dont A z iy a ­ dé a v a it dit «né güzel tchodjouk!» Il a la notion très c la ire , quoique fu rtive, in e xp lic a b le de la présence d ’une âm e pure, sereine et combien reco n naissan te de la pieuse visite dans ce pauvre ci/netière, de l ’o f­ fic ie r fra n ç a is q u 'elle a v a it tant aim é. G râ c e à l’am our plus fo rt que la mort ch an té p ar les bardes de tous les temps et de tous les p a y s, g râce à l’am our, le poète a , pour la prem ière fo is, honte de ses cris de détresse rom antique que, depuis vingt-sept ans de vie e rran te , il écoute se perdre sous tous les cieux du m onde, dans un infini hostile et sans écho, il a honte des lam entations pathétiques sur sa destinée. Lui, l'in d iffé re n t en m atière de relig io n , il découvre en fin , et au coeur de ce Stam boul dont il aim e ave c un égal ravissem ent les mosquées m agnifiques et les ruelles tortueuses, il découvre son propre secret révélé p ar une v o ix , venue des profondeurs jusqu'ici insoupçon­ née de son moi. L'énigm e an go issante de sa destinée est résolue, car le poète a la conviction désorm ais in é ­ b ra n la b le , «qu’il y a quelque chose d'inconnu au

fond de nous-mêmes et au fond des choses, par dessous les choses, qui dépasse les limites de notre fragile vie terrestre et qui triomphe de la mort»: Et,

co ndensant, dans une phrase au style lapidaire* et d ’autant plus e xp ressif, son adm iration pour laTurquie n ou velle, si différen te de c e lle des « h a lle b a rd ie rs d 'A b d u l-H am d i, coiffés de plumets verts et d ’habits é carla te s tout cham arrés d ’o r» , évoqués p ar M. W illy Sperco dans son repo rtag e rétrospectif si riche et si coloré sur Loti, M. G u y M ichaud term ine sa b e lle con­ férence sur le poète des p ay sag e s, des immensités et des torpeurs m élancoliques, sur le m arin-poète fr a n ­ çais qui, grâce à la g entillesse, à la co nfian ce et à la tendresse d ’une fra g ile petite plante de chez nous, a compris et aim é le peuple turc, au point de devenir doucement et à son insu «Turc lui-m êm e», le b rillan t conférencier conclut p ar ces paro les simples et vra ie s comme un axio m e :« S i Loti revenait aujourd'hui, il com­

prendrait qu’au-dessus de ces tombeaux et des mer­ veilleux vestiges d ’un passé révolu, flottait une âme éternelle, et que là est le secret de sa miraculeuse ré­ surrection».

ESTHER CAFFE

Kişisel Arşivlerde Istanbul Belleği Taha Toros Arşivi

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