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Rapport Presente a M. le Ministre de I'lnstruction Puplique par MM. L. Liotard et E. Thomas Professeurs au de Galata Serai (Juillet 1925)

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R A P P O R T

Présenté à M. le Ministre de l'Instruction Publique

par MM. L, Liotard et E Thomas

Professeurs au Lycée de Galata Serai (Ju illet 1 9 2 5 )

Monsieur le Commissaire,

Vous avez bien voulu nous charger d’assister aux examens de français dans les écoles moyennes et dans les lycées turcs et nous demander de vous faire connaître, dans un rapport, no§ impressions d’ensemble.

Nous tenons d’abord à vous remercier, Monsieur le Com­ missaire, de cette marque de confiance qui nous est infiniment précieuse, et à ajouter que les visites que nous avons faites,au cours du mois de juin, dans les différentes écoles, ont été pour nous d’un extrême intérêt. Elles nous ont permis de connaître un grand nombre d’établissements dont le développement ou même l’existence sont trop souvent ignorés; d’apprécier un ensemble d’efforts et de bonnes volontés tout à fait louables, et de constater, en général, chez les professeurs, un amour de leur métier et un désir de bien faire, auquel nous devons, en toute justice, rendre hommage.

Ce n’est pas à dire que tout soit pour le mieux dans un enseignement qui, sous sa forme actuelle, est encore presque à ses débuts. La plupart des maîtres ont conscience de ces

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perfections. Ils son1 les premiers — et c’est un heureux in­ dice — à demander des conseils, à solliciter des directives. Ils se rendent compte que l’œuvre à laquelle ils collaborent est de longue haleine et que le succès suppose la continuité, pendant de nombreuses années, de l’impulsion éclairée qui préside au­ jourd’hui à l'œuvre d’enseignement.

Nous sommes convaincus, Monsieur le Commissaire, que, avec le nombre d’heures consacrées aujourd’hui à l’étude du français dans les écoles moyennes et dans les lycées, sinon dans les écoles normales, des résultats appréciables pourront être obtenus au cours des années qui vont venir, à condition que le personnel actuel soit utilisé au mieux, et, s’il est pos­ sible, renforcé, qu’un peu plus de souplesse soit introduite dans l’application des programmes, que, surtout, les méthodes soient unifiées et améliorées, et enfin qu’un soin très scrupuleux soit apporté dans le choix des livres.

Tels sont, Monsieur le Commissaire, les différents points sur lesquels nous allons vous soumettre, très sincèrement, nos observations.

1.— P e r s o n n e l .

II y a actuellement une assez grande inégalité parmi les maîtres, tant au point de vue de la connaissance du français que de la méthode. La diversité d’origine et de lormation de ces ■ différents professeurs frappe immédiatement. Uu certain nombre ne sont pas toujours sûrs de la langue qu’ils sont char­ gés d’enseigner, ou témoignent trop par leur inexpérience qu’ils ne sont pas professeurs de métier.

Il appartient au Gouvernement, en s’inspirant des rapports des inspecteurs généraux, qui connaissent personnellement tous les maîtres et qui les suivent dans leur enseignement, déplacer les professeurs aux postes correspondant à leurs mérites. Mais même lorsque cette répartition sera parfaite, la nécessité sub­ sistera toujours d’assurer la formation pédagogique des profes­ seurs de français.

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Ce ne sont évidemment pas les écoles normales actuelles qui peuvent assurer, pour l’avenir, le recrutement de ce personnel. Leur but est en effet de former des instituteurs qui enseigne­ ront en turc et qui utiliseront pour la lecture et la traduction le peu de français qu’ils auront appris. Il faut donc envisager la création, soit sous forme d’organisme indépendant, soit sous forme de section particulière de l’Ecole Normale Supérieure, d’un centre de préparation spécial pour les futurs professeurs de français. Préparation qui devra être à la fois théorique et pra­ tique. Pendant la dernière année surtout, la pédagogie appliquée, sous forme de leçons faites devant les élèves, devra tenir un grande place.

En attendant, il n’y a pas d’autre solution que d’utiliser au mieux le personnel actuel, en en modifiant, s’il y a lieu, la répartition, et en renforçant les cadres par l’adjonction de pro­ fesseurs qualifiés, en particulier, si possible, de professeurs français.

Pour les maîtres qui enseignent actuellement, il ne saurait être question de les astreindre à une préparation professionnelle que leur âge et leurs obligations rendent impossible. On pour­ rait cepuidant, dans une certaine mesure, pallier aux insuf-Q fisances de cette préparation et assurer une certaine unité de méthode en réunissant périodiquement les professeurs dans des conférences pédagogiques, où il seraient appelés à exposer les in­ certitudes et les difficultés de leur tâche et où ils pourraient re­ cevoir d'utiles conseils. En général, il nous paraît absolument nécessaire qu’il y ait de temps en temps contact entre les pro- fesseus d’une même spécialité et qu’une entente sur quelques principes fondamentaux précède les efforts individuels, trop dis­ parates jusqu’ici.

2 . — P r o g r a m m e s .

Il y aurait lieu, semble-t-il, de laisser aux maîtres une certaine latitude dans l’interprétation des programmes.

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Par exemple, pour certains cours, et dans certaines écoles,, les programmes imposent, de façon peut-être un peu rigou­ reuse, l’obligation de la traduction. Quelques professeurs ont été évidemment gênés par le caractère impératif du texte du programme. On pourrait, sans inconvénient, permettre au maî­ tre un emploi plus large de la méthode directe, sur laquelle nous reviendrons plus loin, et qui nous paraît plus sûrement que la seule traduction apte à mettre les élèves — même à rai­ son de deux heures de français par semaine — en état de lire un texte et de le comprendre.

D’autre part, l’application du programme ne peut pas tou­ jours être identique, car certaines classes sont faibles et d’autres sont fortes. Le professeur doit être juge de la rapidité plus ou moins grande, du rythme selon lequel il appliquera le pro­ gramme.

Ce qui, en revanche, est capital, cest la rédaction de ce programme, pour l’ensemble des études de français. 11 importe de bien fixer la suite des matières grammaticales et du voca­ bulaire en procédant par ordre de difficulté croissante, de gra­ duer l’enseignement de telle sorte que l’élève aille toujours du connu à l’inconnu. Le point de départ et le point d’arrivée ne sont pas faciles à fixer à priori pour des classes de force très diverse, mais le chemin suivi doit être identique. Et, pour que, dans l’ensemble des études, il n’y ait pas de lacunes sérieuses,, et pour éviter cette absence de gradation dans la difficulté des matières enseignées —: que nous avons constatée à plu­ sieurs reprises, — il est indispensable qu’il y ait entente et liaison entre les professeurs de deux cours qui se suivent, lorsque ce n’est pas le même maître qui conserve ses élèves de l’année précédente.

3 . — M ét hod e

En ce qui concerne la méthode, il nous a été donné de constater qu’en général l ’enseignement du français n’est pas

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-suffisamment orienté vers la pratique. Souvent, après avoir lu un texte, l’élève était invité à le traduire, ou à donner en turc le sens de quelques mots, puis, sans qu’aucune question eût été posée en français sur ce texte, il était invité à analyser grammaticalement une phrase qui lui avait été dictée au ta­ bleau. D’autres fois, après avoir fait lire un texte, le maître l’abandonnait sans s’assurer par la traduction ni par aucune question en français ¿1 les mots ou expressions difficiles avaient été compris ou assimilés, pour poser seulement quelques questions sur l’image accompagnant ce texte. Et cela se pro­ duisait non seulement dans les classes inférieures des lycées, non seulement dans les écoles normales où le but qu’on se propose est principalement de mettre les futurs instituteurs en état d’utiliser pour eux-mêmes les ouvrages français et où la traduction est mise au premier plan par le programme lui- même, mais encore dans les classes supérieures des lycées, où l’élève est déjà en possession d’un vocabulaire étendu, et où les textes étudiés présentaient d’ailleurs mainte difficulté de vocabulaire et de tour. S’il nous arrivait alors de poser à l’élève des questions, même très simples, soit sur le texte qu’il avait lu, soit sur quelque sujet de la vie courante, son embarras était souvent extrême. Visiblement, il n’avait pas été entraîné à cette gymnastique, pourtant élémentaire, qui consiste à retourner sous la forme affirmative ou négative la phrase interrogative du professeur.

11 nous semble bien qu’il y ait là une erreur de point de vue. Une langue est faite avant tout pour être parlée, et pour servir à la pratique de la vie; l’enfant manie sa langue mater­ nelle avec la plus grande aisance avant de savoir ses lettres. Nous ne pouvons nous empêcher de trouver paradoxal et un peu vain qu’un élève soit plus ou moins capable de traduire un texte de caractère déjà littéraire, rempli de difficultés de vocabulaire et de syntaxe, alors qu’il n’est pas en état de ré­ pondre à une question sur son âge, sur l’heure qu’il est, sur le temps qu’il fait, ou plus simplement encore sur les objets qu’il voit. Ce point de vue paraît aujourd’hui si naturel que

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gnement du latin lui-même, dans les lycées français, est orienté en partie au moins dans ce sens, et qu’on s’efforce de donner aux élèves, par de petites conversations en latin, le sentiment que cette langue, aujourd’hui morte, a été elle aussi, dans le passé, quelque chose de vivant; qu’elle n’a pas servi seulement à revêtir des idées générales, ou le récit des grands événements de l’histoire, d’une forme hautement littéraire, mais aussi, et avant cela, à exprimer les besoins les plus humbles de la vie journalière. A plus forte raison ce point de vue nous paraît-il seul admissible, lorsqu’il s’agit de l’enseignement d’une langue vivante, l’une des plus répandues dans le monde, et lorsque tant de circonstances, tant d’exigences professionnelles même, peuvent mettre l’élève d’aujourd’hui dans la nécessité de la pratiquer un jour ou l’autre. Nous sommes même persuadés que les élèves des écoles normales, bien qu’ils ne soient pas desti­ nés à enseigner le français et qu’ils ne l’étudient que pour pouvoir le lire et profiter personnellement des ouvrages écrits dans cette langue, auraient tout intérêt à commencer par la pratique et à la mettre au premier plan pendant deux ou trois ans: outre qu’ils assimileraient ainsi beaucoup plus sûrement, et d’une façon beaucoup plus attrayante, les éléments fonda» mentaux du vocabulaire et les tours les plus cornants de la syntaxe, ils acquerraient aussi, —et par ce moyen seulement,— ce sens du français sans lequel ils risqueront, dans un traduc­ tion, de se méprendre bien souvent sur la valeur exacte d’un terme ou d’un tour de phrase, et de commettre maint contresens.

Telle est l’orientation générale qui nous paraît convenir à l’enseignement du français, et, ce point de départ admis, la méthode directe est de toute évidence, celle qui est appelée à donner les meilleurs résultats. Sa supériorité sur toute autre méthode pour apprendre une langue en vue de la pratique est universellement reconnue aujourd’hui. Ceux d’entre nous qui ont fait leurs études à une époque où elle n’était pas encore en usage, et où l’on s’en tenait à apprendre par coeur des listes de mots et des règles de grammaire, à faire des thèmes et des versions écrits et à traduire à livre ouvert quelque ouvrage

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littéraire, peuvent se souvenir du sentiment qu’ils ont eu de la vanité de cet enseignement et de leur ridicule impuissance lorsque, débarquant en Angleterre ou en Allemagne, ils se voyaient hors d’état d’indiquer au cocher l’adresse ’d’un hôtel, ou de commander leur repas dans un restaurant. Mais ils avaient traduit FAUST et le VICAIRE DE WAKEF1ELD !....

Quelque importance que nous attachions à ce point, nous nous garderons cependant de soutenir que la méthode directe suffise à tout. Le maître n’aura pas toujours sous la main l’objet, ou la figure de l’objet, pour apprendre directement aux élèves le mot qui le désigne;—il 11e pourra pas toujours mettre sous leurs yeux l’image, la représentation figurée d’une action, ni toujours mimer lui-même cette act’on d écrit eux, pour leur expliquer les termes qui l’expriment;—et surtout lorsqu’il s’agit de notions abstraites, il perdrait souvent bien du temps à chercher des détours de langage pour faire comprendre aux élèves les expressions correspondant à ces notions en utilisant uniquement le vocabulaire déjà assimilé par eux. Mieux vaudra sans nul doute dire aux élèves ce que “ la vie’’ signifie en turc, que de leur en donner en français, comme nous l’avons vu faire, une définition abstraite et sc eutifique à laquelle ilg risquent fort de ne rien comprendre. C’est donc ici une ques­ tion de mesure. L’important est que le maître se pénètre bieji de l’idée que la traduction ne doit pas être un but; qu’elle n’est qu’un pis-aller, un moyen “ désespéré”, auquel il convi­ endra de ne recourir que lorsqu’on 11e pourra pas faire autre­ ment, ou qu’on perdrait trop de temps à vouloir s’en passer à tout prix.

La traduction a une autre utilité: elle est pour le profes­ seur un moyen de contrôle qui lui permet de s’assurer de temps à autre que l’élève ne se méprend pas sur le sens d’un tern ie,-et, plus tard, lorsqu’on éiudie des morceaux d'un caracière déjà plus littéraire, la traduction suivie d’un texte peut être utilisée, - mais de temps en temps seulement et non pas de façon systématique, - pour s’assurer que toutes les fines­ ses d’expression, toutes les nuances de la pensée, ont été exac­ tement saisies.

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Préférable à toute autre pour l'étude d’une langue en vue de la pratique, la méthode directe a en outre l’avantage d’en rendre l’enseignement plus attrayant pour l’élève et de mettre plus de vie dans la classe. Rien n’intéresse autant le débutant que d’apprendre à nommer dans la langue qu’il étudie les objets qu’il voit autour de lui dans la classe même, ou ceux que lui présente la vie journalière et dont les images du livre ou des tableaux en couleurs lui représentent l’aspect; rien ne lui plaît plus que d’être, presque dès le début, en état de faire de peti­ tes phrases; rien ne lui donne davantage le sentiment de l’uti­ lité réelle et presque immédiate de l’étude qu’on lui impose; rien par suite ne peut lui inspirer plus d’intérêt pour cette étude et un plus vif désir d’y faire des progrès rapides. D’autre part rien ne met plus de vie dans la classe que les interrogations multipliées que cette méthode comporte, interrogations qui tien­ nent la classe entière en haleine si le professeur a soin de toujours poser la question avant de désigner l’élève qui devra y répondre. Et nous ne parlons pas des gestes, des mouvements, des actions, que le professeur pourra faire exécuter à l’élève et qu’il lui fera analyser, en associant directement à l’image mo­ trice ou visuelle le mot français qui y correspond, nous ne parlons pas dés croquis que le maître pourra faire au tableau pour compléter s’il y a lieu l’illustration du livre.- En regard de cette méthode active, concrète, vivante et éminemment attra­ yante, la méthode de traduction paraîtra singulièrement languis­ sante et morne, ses résultats infiniment plus lents et incertains. Certes, nous ne nions pas que l’emploi de la méthode directe,- outre qu’elle exige du maître beaucoup d’aisance et de sûreté dans le maniement de la langue qu’il enseigne et un tension ininterrompue d’énergie physique et intellectuelle pendant toute la durée de la classe, - présente aussi, surtout au début, des difficulés réelles. L’utilisation judicieuse des tableaux en couleurs, dont chaque établissement aurait intérêt à possé­ der une collection complète, l’emploi de manuels où chaque texte soit traduit en images, comme les ‘‘LEÇONS ILLUSTRÉES DE FRANÇAIS” de BREUIL en offrent un excellent modèle,

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l ’aideront beaucoup dans sa tâche il apportera en outre le plus grand soin à graduer les difficultés et à s’élever par des transitions méthodiques du connu à l’inconnu; - il s’ap­ pliquera à poser des questions aussi nettes et précises que possible, à en varier la forme, et à exiger des élèves des ré­ ponses également nettes et toujours en fo r m e de p h rases c o m ­

plètes, où seront repris les termes de la question. Et si sa tâche ainsi comprise pourra parfois lui paraître plus fatigante, il se trouvera largement dédommagé de sa peine par l’intérêt qu’il verra ses élèves prendre à son enseignement, devenu une vivante collaboration de la classe entière avec le professeur,- et par les résultats, souvent surprenants, qui couronneront ses efforts.

Quant à l’enseignement de la grammaire, il nous semble qu’il y ait lieu de le réduire dès le début à l’indispensable. Nous ne verrions aucun inconvénient à ce que les notions élé­ mentaires en soient expliquées en turc à l’élève et nous n’aper­ cevons pas l’avantage de mettre une grammaire française entre les mains des débutants, que la nomenclature grammaticale et les définitions abstraites ne peuvent que rebuter. N’y a-t-il pas d’ailleurs nombre de points communs entre la grammaire turque et la grammaire française ? Si l’élève a appris dans sa langue maternelle ce que c’est qu’un sujet, un attribut, un complément d’objet ou circonstanciel, etc., etc., quelle utilité y a-t-il à lui rapprendre ces notions en français ? L'analyse grammaticale en français, que nous avons vu pratiquer d’une façon trop systéma­ tique et même quelque peu machinale, nous semble par suite de peu de profit pour le débutant. Qu’il apprenne d’a b c d à parler! Ce n’est que plus tard, au bout de deux ou trois ans, lorsque, en possession d’un vocabulaire déjà étendu, et rompu parla pra­ tique à l’emploi des formes de phrase les plus usuelles, l’élève abordera des formes plus complexes, qu’il pourra y avoir intérêt à lui démontrer le mécanisme de la phrase, à lui apprendre à en reconnaître les différents éléments, et à lui faire préciser les rapports grammaticaux et logiques qu’ils soutiennent entre eux.- L’étude de la conjugaison nous a paru de même

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-avoir été imposée parfois à l’élève d’une façon trop machinale» Qu’importe qu’il sache conjuguer imperturbablement tels temps de l’indicatif ou du subjonctif s’il n’en comprend pas la valeur et l’emploi ? Les diverses formes de la conjugaison ne devraient être étudiées qu’au fur et à mesure que la difficulté et la variété croissantes des textes en amènent successivement l’emploi. Ce n’est donc qu’au bout de deux ou trois ans d’étude qu’un tableau complet de la conjugaison pourra être présenté à l’élève et que ses diverses formes pourront faire l’objet d’une récapitulation systématique.

Il nous semble bien enfin qu’on ait souvent abusé des réci­ tations. Outre qu’elles étaient faites la plupart du temps de façon peu intelligible, alors qu’elles auraient dû constituer un véritable exercice de diction, - il suffisait presque toujours d’interroger l’élève sur une ou deux expressions pour se rendre compte que le sens lui en échappait, et qu’ainsi il avait récité son texte sans le comprendre au moins dans tous ses éléments. Le danger des leçons de mémoire a été assez souvent signalé pour que nous n’y insistions pas. Il importe en tout cas de ne donner un texte à apprendre par coeur aux élèves qu’après l’avoir expliqué à fond en classe et s’être assuré qu’ils en ont tous la pleine intelli­ gence et qu’ils ¿en ont complètement assimilé les expressions. Et cette nécessité même, en raison du temps qu’elle exige, devrait amener le maître à limiter à trois ou quatre par an les exercices de ce genre.

4. - Livres.

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Force nous a été de constater que la plupart des ouvrages employés, étant destinés à l’enseignement du français à des élèves dont il est la langue maternelle, ne répondent pas aux exigences de l’enseignement de cette langue à des étrangers. Le point de vue est en effet bien différent; dans le premier cas on s’adresse à des élèves possédant déjà un riche fonds de voca­ bulaire, maniant la langue avec aisance et avec une propriété

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et une correction grammaticale qui, pour être instinctives, n’en sont p>s moins déjà fort grandes. Il s’agit alors d'enrichir ce fonds, d’amener graduellement l’enfant à mettre plus d’exactitude dans l’emploi des termes, plus de souplesse et de variété dans ses tours de phrase, et d’obtenir enfin un correction grammaticale plus sûre-parce qu’elle sera raisonnée - dans son langage écrit comme dans son langage parlé. Dans le second cas, on s’adresse à des enfants qui ignorent tout de la langue. Il y a donc une nécessité primordiale, qui modifie du tout au tout la marche à suivre dans cet enseignement lorsqu’il s’adresse à des étrangers: la nécéssité de leur faire préalablement assimiler lés éléments essentiels du vocabulaire et les tours de phrases les plus usuels, en un mot de les amener d’abord plus ou moins au point où en est déjà l’élève français, lorsqu’il commence à étudier sa langue d’une façon systématique. Les ouvrages d’enseignement écrits pour les premiers ne peuvent donc pas convenir, pour commen­ cer au moins, aux seconds. Et nous croyons que la plupart des insuccès sont dus à ce qu’on n’a pas envisagé avec une netteté suffisante cette différence de point de vue, et qu’on n’a pas dis­ posé d'ouvrages adaptés aux conditions spéciales de l’enseigne­ ment à donner. Tels manuels que nous avons vu employer (en particulier la METHODE de MACHUEL), se plaçant exclusive­ ment au point de vue de la lecture, présentent dans le vocabulaire une incohérence véritab ement déconcertante. La plupart, faute de grouper les mots de chaque leçon autour de sujets bien définis, relatifs à la vie pratique, manquent complètement de système dans l’étude du vocabulaire: tandis qu’on y rencontre trop de mots inutiles à des débutants, On n’y trouve pas par contre certains des éléments les plus indispensables du voca­ bulaire quotidien. Certaines notions ou certains sujets convenant

à des élèves français manquent d’intérêt pour des élèves turcs, et, naturellement, les sujets qui intéresseraient ces derniers par leur rapport avec la vie et les usages de leur pays font défaut. Dans les ouvrages destinés à des élèves plus avancés, les récits sont le plus souvent beaucoup trop longs et beaucoup trop dif­ ficiles et obligent le maître à recourir de toute nécessité à la

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traduction, dout on pourrait plus aisément se dispenser si une progression rationnelle dans l’étude du vocabulaire et des formes syntaxiques avait été observée.

Un des rares ouvrages pour débutants qui nous aient paru conçus de façon à répondre aux exigences d’une bonne méthode, et par les images qui accompagnent chaque leçon et qui en sont en quelque sorte la traduction visuelle, et par la systémati­ sation du vocabulaire et la simplification du texte, est celui de E . BREUIL: “ Leçons Illustrées de Français”, que nous avons déjà mentionné. Là où il a été judicieusement utilisé, les résultats

sont apparus nettement supérieurs.

II y aurait donc lieu, semble-t-il, d’envisager la rédaction d’ouvrages spécialement adaptés au pays et à la méthode directe. En attendant que ce vœu puisse recevoir satisfaction, il faut se résigner à tirer le meilleur parti de ceux des ouvrages actu­ ellement existants qui paraissent le mieux répondre aux exi­ gences d’un enseignement modernisé. Nous pourrions dès main­ tenant indiquer quelques-uns de ces ouvragés, mais il nous paraît préférable de compléter notre information sur ce point, et de demander à cet effet un délai de quelques semaines, ce qui n’offre aucun inconvénient, puisqu’il ne saurait être ques­ tion d’introduire de nouveaux manuels avant la rentrée de sep­ tembre.

Telles sont, Monsieur le Commissaire, les réflexions que nous ont suggérées les examens auxquels nous venons d’assister. Quels que soient d’ailleurs les programmes, les méthodes et les ouvrages adoptés, il est bien évident que le succès dépendra toujours pour la plus large part de la façon dont il seront ap­ pliqués et utilisés, c’est-à-dire, en dernière analyse, de l’intel­ ligence et de la valeur pédagogique du maître. Une bonne mé­ thode en des mains malhabiles pourra rester relativement infé­ conde, tandis qu’un maître expérimenté pourra d’une méthode surannée tirer un parti judicieux et obtenir des résultats inespé­ rés. Il n’en convient pas moins d’adopter pour méthode unique celle dont une pratique plus récente, mais déjà suffisamment longue et presque universalisée, a démontré la supériorité.

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Il nous serait agréable d’espérer que, par l’exposé que nous venons de vous présenter, nous aurions contribué à en faire généraliser l’application dans les écoles de Turquie, et à servir par là, dans une mesure si modeste soit-elle, l’intérêt supérieur de l’enseignement dans ce pays.

C’est en nous permettant d’exprimer cet espo r que bous vous remercions encore, Monsieur le Commissaire, de la haute confiance que vous avez bien voulu nous témoigner, et que nous vous prions d’agréer

l’hommage de notre très profond respect et de notre entier dévouement.

C onstantinople, le 5 Juillet 192).

Signé: L. LIOTARD E. THOMAS

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