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MECHVERETOrgane de la Jeune Turquie

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Q ua trièm e a n i i i c . X » ?I.

SUPPLÉMENT FRA NÇAI S

1 er lé v r ie r 1899.

R É D A C T I O N

48, R u e Monge, 48

P A R IS

MECHVERET

Organe de la Jeune Turquie

Publié sous l a Direction de

A h m ed RIZA

PUR HISSANT 2 FOIS PAR MOIS

Prix du Numéro

1 0 C E N T I M E S

«

Ordre et Progrès

»

F A U S S E R O U T E

Nous comm ençons maintenant à com prendre les raisons qui ont déterm iné le ch o ix de M. C onstans pour rem placer M. Cam bon à Constantinople.

Il s’agirait, paraît-il, d'im prim er une nouvelle orientation à la politique française en T u rqu ie, de la rendre plus souple, plus com plaisante envers le Sultan.

On sait qu ’après avoir longtem ps adulé le souverain de la T u rqu ie, M. Cam bon, enfin éclairé par les sinistres lueurs des incendies et des o rgies de sang dont l ’A n a to lie fut le théâtre, a va it fini par perdre patience, et, dans une note m ém orable adressée à son gouvernem ent, il avait fait entendre le sévère lan ga g e de la vérité et affirmé la com ­ p licité du Palais et du Sultan lui-même dans les évènements douloureux que nous venons de rappeler.

A bdul-H am id en fut vivem ent blessé, et il faut reconnaître que le lan gage de M. Cam bon, quelque juste qu ’il fût,

n’était pas diplom atique.

A la suite de la publication de ce docum ent par M. Hano- taux, les rapports de l ’am bassade de France avec le Palais, déjà tendus, étaient devenus de plus en plus difficiles ; mais comme la question Cretoise ven ait de poindre à l ’horizon et q u ’une am putation était ju g é e nécessaire àS t-P é te rsb o u rg, on a pensé au quai d ’O rsa y qu ’il fallait maintenir M. Cam bon à son poste jusqu a ce que cette opération délicate fut terminée.

Dans cet intervalle se place le v o y a g e de Guillaum e II à Constantinople et en Palestine et la tentative avortée du cabinet de Berlin de s ’em parer du p rotectorat des chrétiens d ’O rient.

M. D elcassé, qui n’est point « l ’ennemi du Sultan », a ju g é le moment favorable pour amener une détente dans les rapports existan t entre le Palais et le quai d ’O rsay, d ’au­ tant que la R ussie avait déjà pris les devants et fait des avances très rem arquées à l ’hôte de Y ild iz.

On son gea donc à M. Constans qui, par le charm e de son sourire, a va it fasciné N oroddon et séduit le F ils du C iel.

M. Constans a reçu des instructions en conséquence.

Q ue faut-il pour p laire au Sultan ? L ui déclarer sim ple­ ment qu ’il est le plus gran d souverain que la T urquie ait posséd é, le plus ju ste, le plus sage, le plus paternel, le plus clém ent, le plus instruit, le seul dign e du commandement suprême. R este à savoir si M. Constans lui répétera tout cela et l ’encouragera à persévérer dans la m éthode de g o u ­ vernem ent q u ’il a ad op tée depuis vin gt-d eu x ans. Reste à savoir aussi s’il se gard era de lui parler des m assacres des Arm éniens, du châtim ent des coupables et de ces réform es élaborées naguère par les am bassadeurs et dont À bdul-H am id ne veut pas entendre parler.

S ’il est im possible d ’effacer la trace du sang, on peut toujours la cach er...

M oyennant ces concessions, M. Constans amènerait le S u l­

tan a p a y e r les indem nités dues aux Français et à leur accor­ der quelques nouvelles entreprises industrielles qui ne fe­ ront que raffermir les- bonnes relations entre les d eu x pays. Il obtiendrait égalem en t de lui des faveurs pour les mission­ naires et une p rotection plus efficace-pour les quelques mil­ liers de catholiques disséminés dans l ’em pire ottom an. De son côté, la Russie obtien drait les mêmes avan tages pour les G recs orth od oxes et tout irait pour le m ieux dans la m eil­ leure des T u rqu ie !

C ’est pour cim enter et fortifier cette entente que Munir B e y vient de se rendre à C onstantinople. A p p e lé à fournir à son auguste M aître des explication s sur les dispositions du gouvernem ent français à son égard , Munir B ey, qui a su plaire à M. D elcassé, s ’étendra sur les m érites du ministre des affaires étrangères et sur ses excellen tes intentions. Il fera ensuite m iroiter aux y e u x du Sultan la p ossibilité de traiter les Jeunes- 1 urcs avec plus de rigueur à l ’avenir, en paralysant leurs efforts, et en leur im posant le si­ lence au besoin. M. R ib o t a bien fait prom ulguer une loi pour p ro téger le Sultan contre les attaques de la presse : pourquoi l ’honorable M. D elcassé n’obtiendrait-il pas du Parlement une loi qui lui perm ettrait de supprim er le Mech-

veret ? •

Munir B ey se fait peut-être illusion sur ce point. Son rôle, depuis qu ’il est à Paris, n’a-t-il pas consisté à entretenir le Sultan dans des espérances plus ou moins chim ériques? 11 ne m odifiera pas sa ligne de conduite.

L e M echveret n’a pas à s ’en ém ouvoir ; mais il re g re tte ­ rait de vo ir le gouvern em en t français s’en g a ger dans cette vo ie. Nos amis rem plissent les prisons et les lieu x d 'e x il; ils souffrent de la misère et subissent les tortures les plus cruelles. Nous eussions aimé vo ir M. Constans prendre en mains la cause de ces m alheureuses victim es de la tyrannie et convaincre le Sultan que ses sujets ottomans ne deman­ dant en somme qu ’un peu de justice et de liberté, il serait de son intérêt de leur donner satisfaction.

Il nous faut renoncer à cette espérance. S o it ! Seulem ent il nous est permis de croire encore que ce u x de nos amis qui ont échappé à la mort ne seront pas m olestés en France où ils pourront continuer à défendre leurs idées et à plaider leur cause devant l ’opinion.

H

alîl

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.

LES JEUNES-TURCS ET LE SULTAN

Nous pouvons le dire sans fausse m odestie : le Mechveret a lieu d être fier de son œ uvre. L ’immense revirem ent qui s opère, simultaném ent, un peu sur tous les points de 1 hm pire ottom an, tém oigne de la marche rapide de l ’Idée dont notre mission est d ’entretenir le culte en ce journal, comme était religieusem ent entretenu, jad is, au tem ple de V esta, le feu sacré. Je me suis peut-être trop hâté, dans

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MECHVERET

(su p p lém en tfra n ça is)

mon précédent article, de reprocher aux T u rcs leur inertie : il est vrai que je m ’adressais au p eu p le. L e peuple, qui est une manière de m outon de Pan urge, attend qu ’on lui ouvre la m arche. C ’est ce qu ’ont entrepris les Jeunes-T urcs, c ’est à quoi il faut se vo u er et se dévouer. Dans la hiérarchie o ffi­ cielle, dans les adm inistrations, dans le cle rg é , dans l’armée, tous les cœ urs d ’élite qui n’ont pas subi le contact a vilis­ sant du Souverain, du p seud o-C alife, sont acquis à la sainte cause : le régim e d ’anthropophage, qui est le régim e actuel en T u rqu ie, leur fait horreur ; à tous les soufflets que reço it cette m alheureuse T urquie sur la jo u e du C hef, ils frém is­ sent d ’indignation. L e s blessures de la patrie saignent dans leur cœ ur ! E t ils en ont assez de ces hum iliations, de ces opprobres de tous les instants. E t de là le vaste réveil des sentiments gén éreu x dont vib re leur âme.

O ui, le mouvement s ’est bien généralisé. L es sym ptôm es de cette révolution intellectuelle — pour le moment seule­ ment intellectuelle — si grosse de prochains b ouleverse­ ments si le Sultan s’obstine dans ses féroces im bécillités, n’ont pas passé inaperçus de celu i-ci. Une dépêche adressée au T im es dit en effet les terreurs d ’A bdul-H am id p ro v o ­ quées par les « agissem ents » du parti Jeune-Turc « qui recrute journellem ent des membres n ouveaux appartenant a u x m eilleures fam illes. » A in si tous les m oyens — bannis­ sements, incarcérations, tortures, assassinats — em ployés par le bourreau im périal n’ont servi, ne servent à rien; ou plutôt ont fourni de nouvelles armes, donné un regain d ’au­ dace aux victim es de sa tyrannie : car c ’est une banalité de faire rem arquer que les pires révo ltes sont sorties des pires excès. E t les excès de Ham id durent depuis vin g t-d eu x ans ! A tous nos cam arades, à tous les patriotes de T u rqu ie, sans distinction de race ni de religio n , nous faisons un nou­ vel appel. Nous les supplions de ne pas perdre de vue q u ’ils sont l ’unique espoir de ce u x qui souffrent, de ceu x qui gém issent sous la domination illégale et sanguinaire du S u l­ tan ; sur eux, sur eu x seuls le p a y s com pte pour respirer enfin, pour être débarrassé de l ’ép o u van table cauchem ar qui le tient haletant, pour g o û te r un peu de repos, un peu de bonheur — pour viv re, en un m ot! On a beau dire, les nations civilisées ne peuvent ne pas s’ém ouvoir aux efforts de ces vaillants qui consacrent leur e x isten ce à arracher ce qui reste de la P atrie au farouche égoïsm e d ’A bdul-H am id, et cela en bravan t la m isère, la faim et la m ort. Q u ’ils continuent l ’œ uvre si belle de la régénération du p a ys, la p ropagan de si glorieuse des idées de p ro g rè s et de liberté. A u x m alheureux qui, dans leur déception de tout, perdent la notion du devoir, tournent les y e u x vers d ’étrangères région s, qu ’ils redonnent l ’am our du fo y e r, du sol natal : H élas ! c ’est quand on est forcé de s'en e x ile r , quand on le quitte même volontairem ent cro yan t trouver le bonheur là où il n’est pas, q u ’on ressent son charm e m ystérieu x, ses irrésistibles attirances !

Mais l ’heure de la délivran ce n’est pas loin, nous en avons la conviction. C ’est pourquoi, plus que jam ais, nous devons serrer nos rangs et com battre le noble com bat. L e Sultan a des inquiétudes, des terreurs, en constatant le d é v e lo p p e ­ ment du parti Jeune-Turc : eh bien ! causons-lui en davan­ ta g e , des inquiétudes, des terreurs, par notre ténacité dans l’exécu tio n de notre program m e et notre inébranlable con­ fiance en l ’avenir. L u i qui veut d écou rager par son cynism e, que notre foi le d écou rage ! L u i qui abat par le poison et le couteau, qu ’il soit abattu par notre patriotism e !

P. A

nméghian

.

LES “ SEDAN PACIFIQUES ”

D ’A B D U L - H A M I D

A la séance de la Cham bre des députés du 12 jan vier consacrée à l ’affaire D reyfus, par suite de la démission de M. Q . de Beaurepaire, M. P. de C assagn ac faisait le « procès de la R épu bliqu e », selon l ’exp ression de M. C h . D up u y, président du C onseil. A u x attaques de l’orateur contre l ’actuelle form e gouvernem entale en France, des députés républicains ont riposté « q u ’à la fin du com pte, ce n’est pas la R ép u bliqu e, mais le second Em pire qui a fait Sedan ». A quoi M. de C assagn ac de répondre dans un grand mou­ vem ent : « A Sedan on s’est battu ; les pires Sedan sont les

Sedan pacifiques ! »

L e mot m’a vivem ent frappé. En effet, les Sedan pacifiques sont plus désastreux pour les peuples que les Sedan « guerriers »: parce qu’ils tém oignent d ’un manque de cou ­ rage, et « le co u rage perdu, tout est perdu », disait le célèbre gén éral russe S ou voroff. Mais M. de C assagn ac a tort de v o ir des Sedan pacifiques sous la troisièm e R épublique : heureusement pour le p a ys, il n’y en a point. L a terre clas­ sique — ou devenue classique depuis vin gt-d eu x ans — des Sedan pacifiques, c ’est la T u rq u ie d ’A bdul-H am id, lequel, sans se défendre, a fait de nom breuses cessions territoriales aux étrangers ou toléré la violation des principes les plus essentiels de l ’indépendance nationale. P our ne parler que de la dernière m oitié de ce règn e néfaste, — la cession de la R oum élie-O rientale aux B ulgares ; le retrait des troupes turques de la C rète ; l ’évacuation de la T h essalie après l ’avoir conquise, de cette T h essalie sur laquelle la T urquie a un droit de possession cinq fois séculaire qui n’a été inter­ rompu que pendant quelques années seulement en vertu du traité de Berlin dont les stipulations favorables à la Turquie n’ont jam ais été appliquées ; la subordination par le Sultan de l ’in tégrité de l’em pire et de l ’indépendance nationale des O ttom ans a u x décisions des am bassadeurs des puissances à C onstantinople, vo ire même de quelques-uns d ’entre e u x ; la déconsidération terrible où sont tom bés le peuple o tto ­ man, le monde musulman, par le fait d ’A bdul-H am id, à la suite des abom inables m assacres arméniens ; — tous ces faits et beaucoup d ’autres ne sont-ils pas des Sedan p a ci­ fiques, des calam ités que le gén ie infernal du Sultan a a ccu ­ mulées sur la m alheureuse T u rq u ie ? ... L a presse ottom ane — celle qui est libre — ne cesse d ’enregistrer au fur et à mesure tous ces crim es de haute trahison dont se rend co u ­ pable tous les jours, et impunément toujours, hélas ! le sultan A bdul-H am id, le souverain en même temps que le pire ennemi de la T u rqu ie.

L a question de la R oum élie-O rientale a pour la première fois mis à nu l ’intention d ’A b d u l-H am id de sacrifier les inté­ rêts les plus sacrés du p a y s à sa sécurité et au maintien de son absolutism e tyrannique. Plus nous étudierons la ré v o lu ­ tion de P h ilip p o p o li, m ieux nous com prendrons cette d isp o ­ sition d’esprit. E t il im porte a u x p atriotes turcs de se bien convaincre de cette vérité : elle est la boussole de la p o li­ tique étrangère de la T u rq u ie et la source de tous ses Sedan pacifiques et m ilitaires. O r, vo ici comment le Sultan a trahi la T u rqu ie dans la question roum éliste :

En 1885, A le x a n d re de B atten b erg, alors prince de Bul­ g arie, était entré dans la R oum élie-O rien tale, province autonom e ottom ane, pour en prendre possession. A le x a n ­ dre III, le défunt em pereur de R ussie, se trouvait à C open h ague. De là, par une dépêche adressée directem ent

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MECHVERET

(S upplém ent fra n ça is)

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au Sultan, le czar désavoua le prince de B ulgarie et laissa la T urquie libre de rétablir chez elle le statu quo établi par le traité de Berlin. L e s officiers russes, qui organisaient la jeune armée b u lgare, alors très peu nom breuse, et qui y occupaient tous les commandements de_ quelque im portance, quittèrent subitem ent la Principauté, n'ayant laissé à Bat- tenberg qu ’une m ilice sans chefs,absolum ent incapable d ’en­ treprendre une gu erre sérieuse. T o u te l ’E urope continentale était favorable à l ’intervention turque. L a S erb ie et la G rèce auraient même, au besoin, aidé la T u rqu ie, tellem ent elles trouvaient les am bitions politiques des B ulgares démesurées et incom patibles avec leurs intérêts nationaux. L es Bulgares avaient poussé l ’insolence ju sq u ’à exh ib er le gouvern eur ottom an de P ilip po p o li sur un char ; une robuste fille b u l­ gare, sym bole de la patrie, tenait le g la iv e nu sur sa tête. G ette m ascarade parcourut toute la ville dont les habitants cro yaien t faire acte de patriotism e en crachant à la figure du gouvern eur tu rc... L ’opinion publique à Constantinople, autant qu ’on lui perm ettait de s ’exprim er, dem andait la guerre. L e ministère tout entier insistait énergiquem ent sur la nécessité d ’une intervention. L a population bulgare de P h ilippopoli, satisfaite on ne peut plus de son autonomie adm inistrative garantie par les puissances, n’avait aucune envie de se faire annexer par la Principauté et de s ’astreindre au service m ilitaire o b lig ato ire. Néanmoins le Sultan n’est pas intervenu ; il a brusquem ent ren vo yé le ministère de S aïd pacha et a laissé arracher à la T u rqu ie, sans coup férir, une provin ce qui voisine la cap itale, que le chemin de fer met une dem i-journée à traverser et dont la m oitié de la p o ­ pulation est non seulement musulmane, mais encore turque et ottom ane de pur sang.

(L a f i n au p roch a in num éro.) Mohammed.

LA POLITIQUE FRANÇAISE EN ORIENT

On sait que la discussion du b u d get des affaires étrangères offre, chaque année, aux députés une occasion de critiquer la p olitiq ue extérieure de la France.

J’ai lu dans l’ O fficiel du 23 et du 24 jan vier les longs débats des d eu x séances consacrées à ce sujet. L a plupart des députés, ainsi que certains journalistes, s ’en montrent satisfaits. En effet, g râ ce a u x agitations qui inquiètent et divisent le public en ce moment, l’éloquence des orateurs, les termes pacifiques et conciliants de leurs discours devaient trouver un accueil exception nellem ent chaleureux auprès de leurs auditeurs. Comm e j ’ai le malheur de ne p o u ­ vo ir go û ter le charme de l’éloquence dans une langue qui n’est pas la mienne, il m’est difficile de me p a ye r de ces déclam ations de com plaisance, qui ont une si grande force d ’entraînement dans l ’appréciation des affaires politiques. Je ne saisis, fcélas t q Ue le sens vu lg aire des mots, et là où les autres s’enthousiasment je ne trouve, la plupart du tem ps, que des paroles creuses, ou le récit de faits plus ou moins erronés. Je me hâte de dire q u ’il s ’a g it ici de la partie des débats qui touche directem ent la T u rqu ie et qui rentre tant soit peu dans ma com pétence.

On peut ramener cette discussion à trois catégories de faits : l ’introduction des réform es en C rète, les affaires d ’E g y p te , la question p o lític o -religieuse en O rient. L e m odeste cadre du M cckveret m ’em pêche d ’aborder ces trois sujets à la fois. Je me bornerai aujourd’hui à un exam en critique de la p olitique gén érale et de quelques faits rela­ tifs aux affaires crétoises.

M. D en ys C ochin affirme que la Fran ce a toujours tra­ vaillé à la réform e du vieil esprit ottom an.

« Elle a obtenu, dit-il, les réformes au moins nominales qui ont, sous Àbdul Médjid, porté le nom de Charte du Gulhané, qui ont été, sous Abdul-Aziz, qualifiées de lois du Vilayet. »

Je me perm ettrai de lui faire o b server que son argum en­ tation est, au point de vue historique, com plètem ent fausse. L a France, p asp lus que l ’A llem agn e ou l ’A n g le te rre , n’a rien fait, absolum ent rien, pour l’introduction des réform es en Turquie. L es H atts im p é r ia u x , les lois du V ila y et et la Constitution de 1876 ont été l’œ uvre d’hommes d ’E tat ottom ans com posés de G recs, de T u rcs et d ’A rm éniens. L es gouvernem ents français, anglais et surtout russe, n’ont fait qu ’em pêcher ou retarder la mise à exécution de ces réform es, et cela autant par leurs m aladroites interventions en faveur des chrétiens que par leur protection déguisée du régim e despotique d ’A bdul-H am id. C ette p olitique intéressée n’a eu d ’autre résultat que d ’entretenir la discorde entre les d eu x éléments du p a ys, discorde qui, dans ces derniers tem ps, est devenue un véritab le danger pour la sécurité du p euple et pour la sûreté de l ’Em pire.

M. D enys C ochin parle du fam eux mémorandum anglais proposant des m oyens de coërcition contre le Sultan.

« Voilà, à mes yeux, dit-il, où se présentait l’occasion favorable. Nous devions, nous, protecteurs des chrétiens d’Orient, accepter cette pro­ position. Nous fûmes longtemps à répondre, et quand nous y répon­ dîmes nous ne trouvâmes qu’à affirmer une fois de plus le vieux prin­ cipe de l’intégrité du territoire ottoman. »

Il ign ore probablem ent que le gouvernem ent français attendait le mot d ’ordre de la Russie qui, elle, repoussa énergiquem ent cette proposition, le régim e ruineux d ’un chef comme le Sultan actuel ne se prêtant que trop bien à la réalisation de ses visées.

« C est notre vaillant et éminent ambassadeur à Constantinople, dit encore le député de la droite qui a le plus ardemment demandé et sou­ tenu les projets de réformes.

Il est réellem ent à plaindre, ce « vaillant et éminent » am bassadeur, de n’ètre arrivé à obtenir quoi que ce soit après tout le zèle q u ’on lui reconnaît avo ir d é p lo yé . L es fam eux projets de réform es, élaborés par lui et ses c o l­ lègues, n’étaient, d ’après ce que nous en apprend le L iv r e

fa u n e , qu un effro yab le g âch is ne répondant ni aux besoins,

ni aux traditions du p a ys.

Certes, la h ran ce, par l ’interm édiaire de ses écrivains et de ses penseurs, nous a rendu des services inappréciables e t pour lesquels les O ttom ans lui seront éternellem ent recon naissants ; mais son gouvernem ent, surtout dans ces d er­ nières années, n ’a rien fait, n’a rien entrepris pour conso­ lider les liens qui unissaient jad is si étroitem ent les deux peuples. 11 n a rien fait pour le relèvem ent de la T u rqu ie, ni pour le maintien du p restige de la R épublique en O rien t. Q uelques hommes d ’affaires et certains re lig ie u x ont seuls su tirer profit de ce triste état de choses ; mais .ce n’est pas ce genre de succès qui doit être le but d ’un g o u v ern e­ ment soucieux de « rester fidèle aux plus nobles traditions de la France. »

« Nous nous vo yo n s forcés, en ce moment, de m énager même le Sultan », me disait dernièrem ent un député de la d ro ite; et il ne m ’apprenait, h é la s! rien de nouveau. M. D elcassé n’a-t-il pas déclaré lui-même que le g o u vern e­ ment n’était point l ’ennemi du Sultan. Il s’en faut de peu q u ’il ne lui donne bientôt des g a g e s de son am itié et de son

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MECHVERET

(S upplém ent Jra n çcu s)

estime, et cela pour suivre complaisamm ent le bon exem ple que viennent de lui donner G uillaum e II et b rançois-Joseph.

« J’ai déclaré nettement, dit le ministre des affaires étrangères, à l’ambassadeur de Turquie que le Sultan ayant remis aux Puissances la Crète en dépôt, les Puissances étaient désormais responsables de

l’île. »

On en fait de belles, au nom de ce d épôt ! Mais poursui - vons la déclaration du ministre :

«On se remit plus activement à l’organisation du gouvernement pro­ visoire, mais, pas plus que la guerre, l’administration ne se fait sans argent. Il fut donc convenu qu’on mettrait à la disposition du gouver­ nement provisoire le produit des dîmes, et on fixa au 3 septembre l’installation des employés chrétiens dans les bureaux de perception. A Candie, la population musulmane voulut s’y opposer, et se jeta sur les marins anglais qui protégeaient le bureau. Alors, comme sur un mot d’ordre, ce fut une attaque générale des marins et des chrétiens par les musulmans armés... Voilà comment à Candie a été accueillie la pre­ mière application du régime autonome. »

L e gouvernem ent provisoire dont il est q u estio n était le gouvernem ent des révolutionnaires ; il n’y avait pas encore \ la moindre trace du régim e autonom e avant ces troubles de ' Candie. L ’ autonom ie, telle qu ’elle a été prom ise, n’est pas appliquée, même à l ’heure actuelle. L e s musulmans de Candie ont protesté contre la rem ise des bureaux aux insur­ g és, venus pour la plupart d ’A th èn es ; ils ont protesté contre la nomination des em p lo yés, choisis uniquement et intentionnellement parmi la population chrétienne, et, ce faisant, ils n’ont, en somme, que défendu un prin cipe qui apparaît aux Français, même dans leurs colonies tout ré ­ cemment conquises, com m e le prem ier et le plus légitim e de tous les droits.

Pour justifier la nomination du prince G eo rges, M. Del- cassé se croit o b lig é de faire cette observation :

« A l’administration qui venait de disparaître il fallait substituer une administration nouvelle, le régime autonome depuis si longtemps promis aux Cretois. Il saute aux yeux que ce qui devait donner à ce gouvernement sa signification politique, son caractère national, c’était le nom même de son chef. (Celle remarque n'a pas été relevée lorsqu’il s'est agi de désigner un c h e f aux peuples grec, roumain et bulgare.) A cet égard, l’hésitation n’était pas permise. (Pourtant, on a hésitéplu- d'un an!) Du moment qu’on était décidé à accorder aux Crétois le régime de leurs vœux, la sagesse voulait qu’eu même temps on leur donnât le chef qu’ils auraient proclamé. »

Il serait intéressant de savoir comment ces v œ u x des C ré ­ tois ont pu être recueillis. A-t-on fait un plébiscite? A - t on demandé l’avis des 85,000 Musulmans qui sont les plus gro s propriétaires de l’île? L a nomination du prince G eo rg es n’a été préparée et demandée que par les agen ts de la Russie et de la G rè c e ; le succès de leur entreprise n’a été du, en fin de com pte, qu ’a u x ressources en armes et en argent dont ils disposaient. T o u t le monde sait d ’ailleurs comment se forme l ’opinion publique. L e succès de B oulanger, la chute de Jules F e rry nous ont fourni, à ce sujet, un bien triste exem ple, au cœ ur même de la capitale de la civilisation.

Les vrais C rétois, chrétiens ou musulmans, ne sont pas assez naïfs pour demander l’annexion de leur p a ys a la G rèce et se laisser, de la sorte, écraser sous le poids de nou­ velles contributions et de cet im pôt du sang dont ils ont toujours été dispensés. Us ne sont pas non plus assez niais pour proclam er comme c h e f un enfant g âté de la C our, et qui n’a fait preuve, ju sq u ’à présent, que d'une étonnante m édiocrité.

Il n’en est que plus triste de constater que, soit par indif-

paris. — lmp. Jean Gainche, 15, rue de Verneuil.

férence, soit pour les raisons énumérées par M. d ’Estour- nelles, les représentants d ’un grand p eup le s avid e de v é ­ rité se laissent aller à com prom ettre le p re stig e de la France dans cet O rient qui espérait d ’elle tant de grandes

choses. Ah m ed Ri z a.

Constantinople, le 8 janvier 1899.

Il sem ble que le Cham bellan R a g h ib B ey et son associé D ja vid B ey (fils du Grand V izir) sont parvenus à faire partir d ’ici Hafiz Pacha, l’assassin du colon el G hani B e y, qui était lui-même l ’assassin préféré du Sultan.

A ce sujet, quelques rem arques su g g estiv es.

FIafiz,aprèsavoir tranquillem ent q uitté la scène du meurtre, a passé la nuit du 21 au 24 dans plusieurs maisons de Péra. L e soir, il a quitté sa dernière dem eure sous un nouveau dé­ guisem ent. Monté sur un c h e v a l que lui aam ené uninconnu, il s ’est arrêté dans un Flan de G alata appartenant à un G rec, lequel parait, m oyennant un cadeau de L . T . 500, l ’avo ir fait, dans la nuit, passer sur un paqu ebot étranger.

Dans les d iverses maisons où il s’est caché, Hafiz a laissé beaucoup d ’argent. Dans celle où il est resté du 24 décem ­ bre au 2 jan vier, il a laissé L . T . 170 (près, de 4.000 fr.). Partout la p o lice est arrivée quelques heures après le départ de l’assassin.

On a d ’abord, non sans fondement, pensé que R agh ib ferait assassiner Hafiz, pour éviter les indiscrétions de celui- ci s ’il était pris. L e Cham bellan paraît avoir renoncé à ce projet pour ne pas s ’exp o ser aux indiscrétions de celui, ou de ceux, qu ’il aurait ch argé de cette dernière exécution.

L e Sultan, lui, est très inquiet en raison de l ’attitude des A lban ais si nom breux dans le Palais et à ses alentours.

L e vendredi 30, le bataillon de ceux-ci a d abord refusé de faire le serviced u S élam lik, disant q u ’il ne m archerait pas tant que l ’assassin de Ghani, leu r com patriote, ne serait pas puni.

On n’a décidé ce bataillon à venir à la parade qu a force de cad eaux et de prom esses. L e dimanche 12 jan vier, les A lbanais ont cerné le K o n a k de R agh ib , demandant que ce cham bellan, vrai assassin de Ghani, leur fût livré. On les a calm és à grand-peine.

Un autre incident, diplom atique celui-là, dém ontre à Ham kl que le m ensonge, qui est sa monnaie courante, a aussi des inconvénients.

A part toutes les concessions qu ’il a déjà données aux Allem ands, le Sultan a prom is à G uillaum e II q u ’il en don­ nerait encore d ’autres. O r, depuis le départ de ce dernier, rien n’a été fait ; d ’anciennes affaires, pour la conclusion desquelles des engagem ents form els avaient même été pris, restent en suspens.

L ’am bassadeur d ’A llem agn e a réclam é à diverses reprises et s’est heurté à des réponses vagu es.

Il a alors fait demander une audience ; nouveaux p ré­ tex te s de retards, ap p u yés, tantôt sur de prétendues indis­ positions du Sultan, tantôt sur ses occupations écrasantes,etc.

Irrité enfin, le baron M arschal a adressé au Palais une note très raide par laquelle il a e x ig é une audience. 11 va falloir la lui accorder, et on peut se demander comm ent le Sultan s’en tirera, car il lui est difficile de retirer ses prom esses et, s’il les exécute, il aura sur le dos l ’A n g leterre, la France et la R ussie.

Le Gérant : Houillon.

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