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L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL,
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que, maîtresse aujourd’hui des droits de M. Scribe, elle n’avait point accordé à M. Bagier l’autorisation de re présenter au Théâtre-Italien l’opéra de liellini, celui de Donizetti et celui de Verdi.
Le Tribunal décida que cette autorisation n’était point nécessaire : les librettistes italiens avaient contrefait les poémas de Scribe, la chose était hors de doute ; mais, comme leur usurpation remontait à plus de trois ans, il n’y avait rien à leur dire, et M. Bagier profitait de la prescription qui leur était acquise.
La Cour n’a point été de l’avis du Tribunal, et son ar rêt déclare nettement que de l’usurpation d’un auteur ne peut naître un droit pour le directeur de théâtre; que la représentation d’un ouvrage dramatique est une reproduction distincte de toute autre ; que la prescrip lion acquise à la représentation et à l’édition, qui datent d’une époque assez ancienne pour que le délai de la prescription soit accompli, ne couvre pas les représen tations et les éditions postérieures.
La Cour a donc fait défense à M. Bagier ;le jouer, à l’avenir, la Sonnumbulà, VElisire d’amore et le Iialloin
masclœra, sans l’autorisation de M“ “ Scribe; mais il ne
lui a point accordé de dommages-intérêts pour le passé, par ce motif que Scribe
avait toléré les représen tations, et même accepté des compensations.
Tant de droit el des mots si barbares à propos de trois opéras ! Que vou lez-vous? 11 y a une jeune fille dans les Contes de fées qui ne pouvait ouvrir la bouche sans qu’il en sor tit des roses, des lis, des diamants, des rubis et des émeraudes; celte jeune fille-là. ne s’appelait pas Tbémis de son petit nom.
Et les héritiers de Paul Niquet plaident contre
l'Omnibus... 0 abomina
tion de la désolation! tom ber des Italiens dans un cabaret', et dans quel ca baret ! car ce cabaret-là n’est pas de ceux où les marquis et les vicomtes de la Régence seraient allés volontiers faire leurs petites débauches.
Voulez-vous une des cription de cet aimable lieu, et un croquis des mœurs des habitués? Li sez ces lignes, extraites de VHistoire des cafés et
des cabarets de Paris, par
M. Delvau :
k La salle était dallée comme le couloir par le quel on y arrivait, et, comme le couloir, elle étaittoujourshumide pour les mêmes raisons. Tout autour régnaient quel ques bancs, où de vieilles chiffonnières faisaient ta pisserie, abruties par l’i vresse, tandis que les vieux chiffonniers philo sophaient le long du comptoir, entre deux pe tits verres... Ces disputes
n’étaient pas toujours fra ternelles , comme elles auraient dû l’être entre péripatéticicns; on y mê lait des affaires de com merce, — le commerce de la chiffe, — on se je tait au nez certains tas d’ordures indûment a i- caparés : inde irœ ! Com me on ne pouvait pas al ler chercher la garde à
LA TOU 11 PE g a l a t a A CONSTANTINOPLE.
tout moment pour mettre le holà dans ces coups de poings et dans cés coups de dents, parce que la garde aurait trou vé cela mauvais, le vieux père Niquet, déjà célèbre sous l’Empire par ses cerises à l’eau-de-vie, avait imaginé, à ce qu’il parait, un système de conduite d’eau qu’on lâchait sur les combattants enllammés, pour les éteindre un peu. Lorsqu’ils résistaient à ces douches intentionnellement bienveillantes, on levait alors un appareil qui fermait hermétiquement la seule issue possible, et l’eau montait, montait, montait de la cheville au genou, du genou plus haut, et les combattants, naturellement hydrophobes, fi nissaient toujours par crier grâce. »
L’eau-de-vie, chez Paul Niquet, se payait un sol le grand verre.
De quoi se plaignent donc les héritiers de Paul Niquet? L’Omnibus, disent-ils, a publié un rorr an-feuilleton in titulé les Nuits de Paul Niquet, qui représente le cabaret comme un lieu de crimes et de débauches, et outrage la mémoire de leur père, beau-père et aïeul, dont la noto riété, quelle qu’elle fût, ne pouvait autoriser des impu tations aussi graves; de plus, le roman laisse croire que le cabaret appartient encore aux descendants de celui qui en fut le premier propriétaire, et le fait n’est point
exact.
Le Tribunal condamne
VOmnibus; l’Omnibus ap
pelle du jugement, et la Cour infirme.
Sans doute, dit l’arrêt, ou trou ve dans les Nuits de
Paul Niquet des peintures
etdes exagérationsregret- tables, mais on ne peut accuser l’Ûmîit!/us d'inten tions méchantes, partant, il le faut acquitter. Si le public a pu croire que la dynastie des Niquet trô nait encore aux Halles, c’est la faute de Niquet père el des fi.s Niquet, qui n’ont point exigé que leur nom disparût alors qu’ils avaient abdiqué. Ce nom, il est attaché à tout jamais au célèbre cabaret, ctsur ce pointencore l’Oi»-
nibus est sans reproche.
M'1* Thérésa... .Pardonnez-moi, made moiselle, de parler de vous juste au moment où je viens de parler de Paul Niquet; je sais à merveil le que vous faites les dé lices de la haute société, que les hommes du meil leur monde s’entassent dans un café chantant
pour vous entendre,
que les princesses qui v iulent donner le concert à leurs nobles invités se demandent : « Aurai-je la Patti? Aurai-je Thé résa? » et que vous l’em portez quelquefois; je sais tout cela. Mais que voulez-vous? on ne fait pas ce qu’on veut dans une chronique, et puis toules les âmes ne sont- elles pas également sensi- ■ blés à ce qui est vraiment beau? A ce compte-là, n’avez-vous pas de quoi enthousiasmer cequiestla fleur de notre société et... et ce qui n’en,est pas la fleur? Et si Rien n’est sacré
pour un sapeur ravit au
faubourg Saint-Germain, n’est-il pas certain que ce refrain plairait chez Paul Niquet?
Donc, M11* Thérésa Val- v
Kişisel Arşivlerde Istanbul Belleği Taha Toros Arşivi